Trois ministres depuis 6 mois. 5 depuis mars 2022. Cette valse ministérielle aura été sans cesse à contretemps, aggravant la crise que traverse l’Education nationale. Rythme effréné des annonces puis mensonges et provocations et maintenant, le retour des ordres et contre-ordres. Quelle crédibilité accorder alors à la parole politique ? Les différentes réformes envisagées ne vont faire que renforcer les dégradations des conditions de travail des agent·es et les inégalités déjà existantes entre les élèves, et entre le public et le privé. Les ministres passent, se contredisent, et pendant ce temps, l’École publique est au bord de l’effondrement.
Le rythme voulu par le gouvernement et par l’antépénultième ministre de l’Éducation nationale voit ses limites. Nous avons alerté à de multiples reprises, au-delà de notre appréciation des réformes, sur les conséquences délétères pour les personnels et les élèves de réformes incessantes. Aujourd’hui l’agenda social du CSA MEN pourtant examiné le 23 janvier 2024 n’est absolument pas tenu : certes, il y a eu des changements de ministres, mais il y a surtout un rythme intenable, méprisant pour les personnels et leurs organisations syndicales représentatives. Les personnels ont besoin de pouvoir bien faire leur travail et de ne pas être soumis à des pressions permanentes. Avec ce rythme, le dialogue social devient caduc. La FSU rappelle que la qualité du dialogue social peut se mesurer à la qualité de l’écoute et à la prise en compte de la parole des organisations syndicales représentatives qui connaissent le terrain. Lorsque celles-ci demandent des bilans des précédentes réformes, des projections et études d’impacts sur les réformes à venir, ce n’est pas avec l’objectif de faire travailler les personnels de l’administration centrale mais bien pour pouvoir porter une analyse sérieuse des transformations proposées. La FSU réaffirme ici qu’imposer une réforme de la formation initiale dès la rentrée 2024 est irresponsable et peu respectueux de l’ensemble des personnels qui concourent à cette formation, ainsi que des étudiant·es qui vont la subir dans l’urgence.
Elle risque, imposée dans les délais impartis, d’avoir les effets inverses de ceux recherchés et de déstabiliser encore plus le service public d’Éducation.
Le ministère souhaite Renforcer l’attractivité des métiers mais cela passe en premier lieu par des mesures salariales sans contrepartie. La FSU condamne l’absence de toute perspective de mesures générales d’augmentation des rémunérations dans l’Éducation nationale dans un contexte d’inflation encore soutenue. Il est urgent d’ouvrir sans délai des négociations pour améliorer les carrières et prendre des mesures générales pour les salaires, notamment en revalorisant le point d’indice, dans un contexte d’effondrement du niveau des rémunérations des agent·es publics
Même si nous examinons à ce CSA MEN des mesures de revalorisation des infirmières, il était temps, celles-ci ne sont pas suffisantes et ne suffiront pas à pallier la désaffection de la profession d’infirmière de l’Éducation nationale pourtant si importante dans les écoles et les établissements, leur rôle n’est plus à prouver dans les équipes pluri professionnelles.
Par ailleurs, l’absence de toute mesure pour les personnels sociaux contrairement aux engagements pris, démontre en creux le peu de considération que le ministère porte à ces professionnelles pourtant essentielles elles-aussi. L’écart de rémunération entre personnels travaillant en étroite collaboration et avec un même niveau de qualification est inexplicable et vécu comme un affront par les personnels sociaux qui se mobiliseront le 22 mars.
Quelques jours après la constitutionnalisation de l’IVG, de la journée du 8 mars et des promesses gouvernementales d’Égalité professionnelle, force est de constater que ces deux professions, fortement féminisées souffrent encore d’un manque criant de considération. Sur l’égalité notre ministère a encore fort à faire. Confrontées à une explosion des besoins des élèves et étudiant·es et à un accroissement des inégalités sociales et scolaires, les infirmières et assistantes sociales de l’Éducation nationale ont subi une forte dégradation de leurs conditions de travail faute de moyens supplémentaires.
Pour la FSU il est impératif de poursuivre des actions fortes pour améliorer les salaires, les formations et les conditions de travail de ces deux professions essentielles à la lutte contre les inégalités sociale et de santé. Une nécessité à l’heure où le Sénat se prononcera le 20 mars prochain sur le transfert de la « médecine scolaire » aux collectivités territoriales volontaires. La FSU rappelle son opposition à tout transfert des assistantes sociales et des infirmières conseillères de santé qui doivent rester, pour ces dernières, affectées au sein des EPLE, sous l’autorité administrative des chefs d’établissements. Depuis plus de 80 ans, les ministres successifs de l’Éducation nationale ont réaffirmé cette nécessité, la ministre doit poursuivre cet objectif.
Plus globalement, il est grand temps de revaloriser tous les corps de l’Éducation nationale ; investir dans la jeunesse de demain pour plus d’égalité passera par d’autres dispositifs que le SNU ou encore l’uniforme. La reconnaissance des personnels passe d’abord par des questions de rémunérations indiciaires afin de ne pas pénaliser encore une fois les femmes qui constituent une majorité à l’Éducation nationale.
Mais comment croire que l’Éducation est une priorité quand le budget de l’Éducation nationale n’est même pas préservé des coupes budgétaires ? Quelques mois après le non vote du budget à l’Assemblée nationale, les hypothèses économiques sont revues et voilà qu’un coup de rabot de 10 milliards s’annonce sur le budget de l’État, avant une coupe de 20 milliards l’an prochain. L’Éducation nationale rend 692 millions en 2024, qu’en sera-t-il en 2025 ? Il est trop facile de parler de contraintes économiques : le budget, ce sont d’abord des choix politiques. Et ceux de l’exécutif sont clairs : alors que l’Ecole manque de tout, cette décision est inacceptable et insupportable. De plus, depuis l’annonce de ces annulations de crédits, nous entendons toutes les explications possibles et imaginables en fonction des interlocuteurs : nous exigeons la plus grande transparence lorsque ce point sera abordé dans ce CSAMEN.
L’étape de reconnaissance salariale devra être accompagnée de mesures d’amélioration des conditions de travail, et ce ne sont pas des groupes de niveau dont les élèves et les enseignant·es ont besoin mais d’une baisse d’effectifs par classe, pour pouvoir répondre à tous les élèves. Les mesures « choc des savoirs », dont la FSU demande l’abandon, que ce soit 1er ou 2nd degré, la mise en place de stage d’observation en seconde, la réforme de la voie professionnelle, vont d’une part renforcer les inégalités, déposséder les enseignant·es de leur expertise mais aussi déstabiliser l’organisation des établissements scolaires et par conséquent l’ensemble de ses personnels et des élèves.
Malgré l’affichage serein du ministère, celui-ci devrait s’enquérir des remontées qui lui sont faites par l’ensemble des personnels dont les chefs d’établissement, les IEN et les IA IPR ! Le ministère travaille contre ses personnels et contre les avis scientifiques.
A la FSU toutes les mesures prises ces derniers temps renforcent notre conviction : la volonté réelle du gouvernement est de détruire l’ensemble des services publics, seuls lieux pourtant à même de lutter en partie contre les inégalités !
La gestion du dossier groupes de niveaux est emblématique des impasses actuelles : portée envers et contre tout, par Gabriel Attal, cette mesure est le symbole du projet d’École conservateur et passéiste du premier ministre. Alors que la ministre acte, devant les organisations syndicales, la disparition des groupes de niveaux des textes réglementaires, Gabriel Attal ne peut s’empêcher de la contredire 24h après. Pourtant, après des semaines de cascades sémantiques, il y avait là une avancée. Est-ce cela que le premier ministre ne supporte pas ? Nous voilà revenu à la grande époque ordre, contre-ordre, désordre du Covid ! Mais que le premier ministre n’accepte aucun bougé sur une mesure qui fait la quasi-unanimité contre elle est un vrai problème démocratique. C’est même irresponsable dans le moment de crise que traverse l’Ecole et de crise démocratique que traverse notre société. Les textes publiés seront le juge de paix pour savoir qui au gouvernement joue aux pompiers pyromanes avec l’Éducation nationale.
La FSU continue de vous alerter au sujet du déploiement d’Op@le dans les services financiers de nos établissements scolaires. Il devient très urgent de prendre des décisions de nature à accompagner au mieux les collègues dans ce changement rendu encore plus difficile par l’introduction d’un outil inabouti : Il faut desserrer le calendrier du déploiement et octroyer des renforts en personnels, pour assister et renforcer les services des personnels ressources qui pourraient assumer les charges de formation et/ou de tutorat de proximité.
La plus grosse opération de gestion du ministère, le mouvement inter académique, vient de se dérouler. Comme depuis la mise en place de la loi du 6 août 2019 et la volonté d’évincer les organisations syndicales d’une gestion paritaire, celui-ci connaît des bugs et non des moindres. Dans le premier degré, les personnels ont reçu un sms contradictoire avec le message de Iprof semant ainsi la plus grande confusion. Trois départements ne voient aucun personnel entrer par mutation, et 22 départements ont des barèmes d’entrée entre 500 points et 1515. Trop d’enseignant·es ne peuvent plus se projeter dans leur métier à cause de situations intenables. Dans le second degré nous sommes destinataires d’un nombre élevé de recours pour, parfois, des erreurs de barème que les rectorats ont refusé de corriger.
Précédemment, ces situations se réglaient en amont des résultats ce qui évitait des drames. La mobilité est un élément d’attractivité très important, pour lequel le ministère avait promis le 13 septembre un travail avec des chercheurs auquel les organisations syndicales pouvaient être associées. Où en est-on de ce chantier ? Était-ce encore un effet d’annonce ? Au vu des résultats, le second degré a besoin d’une analyse rapide de l’impact sur le mouvement des 1000 points pour l’ensemble des collègues ayant travaillé 5 ans à Mayotte.
La loi de transformation de la fonction publique a non seulement supprimé une grande partie des compétences des CAP qui permettaient transparence et gestion humaine des situations, mais elle ouvre aussi la possibilité accrue de recruter des non titulaires. Les conséquences sur la mobilité des titulaires ont un impact sur l’attractivité. Des académies deviennent inaccessibles dans certaines disciplines, notamment celles de l’outre-mer, alors que de nombreux postes vacants existent et que de nombreux·ses contractuels·les sont embauché·es. La concurrence entre les personnels ne va pas dans le sens d’une amélioration du fonctionnement du service public d’éducation. Pour la FSU il est nécessaire de recruter plus dans les concours partout où cela est possible, d’envisager un plan de titularisation mais aussi d’engager un véritable travail sur la mobilité, comme facteur d’attractivité. La communication du nombre de non titulaires par discipline, par académie pour le second degré est une nécessité.
La question de la mobilité dans les disciplines professionnelles est d’autant plus importante que les cartes de formations 2025-2027 des lycées professionnels sont en préparation dans les académies. Les évolutions selon les objectifs quantifiés annoncés par l’ex ministre déléguée C. Grandjean seront la cause d’un véritable plan social pour les PLP. Or à ce jour, seul le droit commun est envisagé et la parution d’un vade-mecum rappelant les possibilités ne peut pas être considéré comme un début d’accompagnement. Les reconversions et autres mesures ne pourront pas attendre la rentrée 2025, c’est dès maintenant que le ministère doit assumer et mettre en place un réel protocole d’accompagnement.
A quelques mois des JOP qui vont se dérouler en France, le gouvernement rabâche à qui veut l’entendre la notion d’héritage. Il va jusqu’à dépenser 16 millions d’euros pour diffuser auprès des élèves d’élémentaire les discours présidentiel et ministériel. Mais de quel héritage parle-t-on : des 1200 postes de Professeurs d’EPS supprimés depuis 2017 ? Des 10% d’élèves qui ne bénéficieront pas d’apprentissage de la natation au cours de leur scolarité ? Des 85% d’installations sportives à rénover d’ici 2030 ? Des dispositifs imposés qui viennent en concurrence directe avec l’enseignement de l’EPS pourtant premier lieu de démocratisation des activités physiques sportives et artistiques, du manque de formation initiale en EPS pour les PE ? Du déficit de l’UNSS ? C’est en ce sens que le SNEP FSU a appelé à la grève le 15 mars.
Les raisons de la colère des personnels de l’éducation nationale sont multiples salaires, suppressions de postes, conditions de travail dégradées, manque de moyens pour l’inclusion, mépris en imposant des méthodes et des pratiques pédagogiques. De nombreuses actions et grèves ont lieu sur l’ensemble du territoire les 650 suppressions d’emplois dans le premier degré se concrétisent par plus de 2 000 fermetures de classes qui vont encore dégrader la qualité du service public d’éducation. La FSU participe aux mobilisations avec les parents d’élèves et les représentant·es des collectivités pour dénoncer ces cartes scolaires de renoncement et appelle à les amplifier. La FSU soutient les actions des personnels de Seine-Saint-Denis qui exigent un plan d’urgence pour l’école publique dans ce département le plus pauvre de l’hexagone qui concentre de très nombreuses difficultés, économiques, sociales et scolaires. Aujourd’hui, l’Ecole publique qui y est dans un état de délabrement avancé, au sens propre comme au sens figuré, n’a pas les moyens d’assurer ses missions. Que l’État ne soit pas en mesure d’assurer un service public de qualité aux élèves les plus pauvres est scandaleux et un renoncement à l’ambition des services publics. Mais si vous y renoncez, nous n’y renonçons pas : pour nos salaires et l’École publique, la FSU appelle à la grève le 19 mars et à inscrire l’action dans la durée.