Déclaration préalable de la FSU au CSA MEN du 20 juin 2023

La fin de l’année approche et avec elle, l’heure des premiers bilans. Et quels que soient les sujets, une ligne directrice se dégage dans la politique ministérielle : se défausser sur les personnels sommés d’assumer les défaillances de l’État. Conjuguées à cela, des décisions autoritaires non discutées en concertation avec les OS et en contradiction directe avec les informations que vous donnez 3 jours avant en CSA : pour exemple, le document envoyé vendredi 16 juin par la DGESCO  annonce 13 briques éligibles pour le pacte LP alors que le mardi 20 juin droit dans les yeux : vous nous annoncez 9 briques ! Le mardi vous affirmez la non-sécabilité du pacte en LP le lundi son contraire ! Mais quel mépris pour les collègues ! Nous y reviendrons plus loin.

La lutte contre le harcèlement scolaire ne peut se faire à coup d’improvisation et de coups de communication, à l’image de l’injonction à organiser du jour au lendemain une heure de sensibilisation contre le cyberharcèlement en collège. Comme si les personnels n’étaient pas engagés dans un travail de fond sur ce sujet ! Cette annonce ministérielle a été très mal vécue par les personnels qui y ont vu une provocation méprisante. Le harcèlement tue, c’est insupportable et inacceptable. Ces drames ébranlent les équipes qui doivent souvent alors faire face, seules, à la vindicte populaire dans une forme de tribunal médiatique insupportable.

La prévention du harcèlement scolaire souffre d’un manque évident de personnels pour enseigner et éduquer. Que se passe-t-il dans les couloirs, dans les cours faute de personnels disponibles en nombre suffisant ? Que se passe-t-il dans des classes surchargées ?  Combien d’établissements scolaires sont sans infirmière, sans assistante sociale, sans psychologue de l’éducation nationale ? Combien d’établissement vont perdre des AED ? Où trouver le temps pour travailler en équipe pluriprofessionnelle à la prévention et au traitement des situations de harcèlement ? Les personnels se trouvent souvent démunis, faute de moyens, de temps et d’un cap clair en la matière. Le harcèlement scolaire est un fléau qui nécessite la mobilisation de toute la communauté éducative et bien au-delà de toute la société : les géants des réseaux sociaux ne sauraient passer à travers les mailles du filet de leur immense responsabilité en matière de cyberharcèlement.

Qui est en défaut dans le remplacement des enseignant·es absent·es ? Le ministère veut faire peser cette responsabilité sur les enseignant·es. Il affiche partout le nombre d’heures non assurées sans rien distinguer : absences de longue durée, absences de courte durée, absences pour raisons institutionnelles… En instrumentalisant ces chiffres, le gouvernement entretient le cliché du professeur absent, habile et néanmoins inadmissible moyen de rendre les personnels responsables d’une carence de l’État.

Le nombre d’heures non assuré le plus important relève bien de décisions budgétaires et politiques répétitives pour diminuer le nombre de postes offerts dans les différents concours de l’éducation nationale, même dans ceux où le vivier existe.

Les suppressions de postes par milliers, dans le premier comme dans le second degré, l’absence de revalorisation digne de ce nom ne permettent plus d’assurer la continuité du service public d’Éducation !  Dès le début d’année, des élèves ne bénéficient pas de toutes leurs heures d’enseignement. Dans ce contexte, le remplacement de courte durée ne sera qu’une rustine pour un système bien mal en point. Encore plus quand se confirme la tromperie présidentielle : les absences des professeur·es ne seront pas systématiquement remplacées à la rentrée : le ministre a reconnu lui-même que ce ne serait qu’à l’automne, et ce ne sera pas du poste pour poste, et cela pourra même être des élèves devant une capsule numérique !

Et qu’en est-il du remplacement dans le premier degré ? Le ministère se garde bien d’en parler, c’est sans doute parce qu’il n’y aura pas de recrutements supplémentaires à la rentrée dans le premier degré. Cela n’a pas l’air d’inquiéter le ministre qui affirme que dans les écoles primaires, “ce n’est pas grave, les élèves sont accueillis”. Alors oui les enseignant·es répartissent les élèves de leurs collègues absent·es non remplacé·es dans le fond de leur classe, oui ça désorganise toute l’école et non, il n’y a pas de continuité du service public ces jours-là parce que ce n’est pas possible d’organiser les apprentissages dans ces conditions !

Plutôt que ce bricolage institutionnel, investir dans le service public de l’éducation nationale devrait être une priorité absolue, c’est de l’avenir de notre jeunesse dont il s’agit.

Puisqu’il est question du pacte, arrêtons-nous un instant sur la situation dans les écoles et établissements. Ordre, contre-ordre, absence de consignes claires, pression sur les personnels malgré tout, on se croirait revenu aux plus grandes heures du précédent quinquennat pendant la période Covid. Y a-t-il encore un pilote dans l’avion ? Ici, vous nous annoncez un suivi des heures effectuées dans les briques quantifiables, dans les écoles et établissements, on entend « ce n’est pas grave si vous ne faites pas les 18h ou 24h ». Ici, on entend que les IMP existent toujours, dans les établissements, on entend qu’elles ne permettent plus de rémunérer les référents existants ! Et nous ne disposons toujours pas des dotations pacte par académie… Et que dire des annonces faites sur le pacte en LP après avoir démenti pendant plusieurs semaines, nouveau revirement : le pacte serait devenu sécable au prétexte que le ministère du travail, au travers de Carole Grandjean, aurait « entendu » les recteurs ? mais de qui se moque-t-on ?  Des PLP et des OS véritablement représentatives des personnels directement impactés ? La question va au-delà de qui pilote l’EN ? Mais peut se résumer aussi par :  l’EN a-t-elle vendu voire bradé les LP au ministère du travail ?

Au-delà de la mise en place précipitée du pacte, la logique de celui-ci est en train de faire dysfonctionner les équipes pédagogiques et éducatives. Besoin de collectif, le pacte induit de la concurrence. Besoin de stabilité, de projections, le pacte induit du flou et de l’incertitude.

Besoin de financement pour les projets, tout devient prétexte à l’innovation pédagogique (végétalisation des écoles et établissements, médiation animale, voyage scolaire, etc.) pour faire passer une des briques du pacte, sans considération pour les projets existants. A vouloir appliquer à tout prix une commande présidentielle hors-sol, qui ne répond en rien aux besoins de l’Ecole et des personnels, vous mettez sous tension tout notre système éducatif. La FSU réaffirme son opposition au pacte, exige son abandon et le versement des sommes consacrées dans la partie socle.

Depuis hier, nous avons une vision presque globale des résultats du CRPE puisqu’il ne manque plus que les chiffres de Mayotte, c’est donc plus de 1530 postes que nous perdons tous concours confondus. Et ce n’est pas les concours supplémentaires de Créteil et Versailles qui vont combler ces pertes. Le choc d’attractivité n’aura donc pas encore lieu cette année. Par ailleurs, alors que des listes complémentaires existent dans la majorité des académies, certaines sont pourtant en train de recruter des contractuel·les : Limoges, Aix-Marseille, Lyon, Nice, Normandie … Nous vous demandons de donner l’autorisation et d’inciter les recteurs et rectrices à ouvrir la liste complémentaire. Nous vous rappelons qu’il avait fallu attendre septembre l’année dernière pour que les collègues sur cette liste soient enfin appelé·es.

Cette fin d’année est particulièrement éprouvante pour nos collègues : course contre la montre pour finir les programmes, explosions de certains élèves mettant à mal l’ensemble de l’école,  gestion des désillusions des élèves face à la machine à broyer qu’est ParcourSup, interrogations sur le sens de cette fin d’année où le troisième trimestre a ressemblé au grand vide dans les LGT (et ce n’est pas en raison d’une démobilisation des enseignant·es quoi qu’en dise le co-pilote du comité de suivi de la réforme du bac/lycée).

Et voilà que le ministre de l’Éducation nationale et la secrétaire d’État à la jeunesse et au SNU ont présenté le jeudi 15 juin, l’organisation du SNU pour l’année 2023-2024. Sur proposition d’enseignant·es ou d’équipes pédagogiques, intégrée dans le pacte, des classes s’engageront sur une année scolaire dans un projet intégrant le séjour de cohésion de 12 jours sur temps scolaire. Une fois encore, le gouvernement avance sans écouter les organisations syndicales qui, toutes, réaffirment l’absurdité d’un SNU sur temps scolaire. Nos élèves ont besoin d’École, pas de SNU. Pour la FSU, cette opération politique est un bien mauvais coup porté au service public d’Éducation dont le rôle émancipateur, creuset de la construction des citoyen·nes de demain est affaibli au profit d’un gadget politique présidentiel aux allures de gaspillage d’argent public, près de 2 milliards en cas de généralisation.

Combien de mesures depuis le début de cette année scolaire auront fait l’unanimité des organisations syndicales représentatives des personnels contre elles ? Nous redisons ici que l’école et les élèves ont besoin de personnels en nombre suffisant formés et mieux rémunérés.

La réforme engagée dans la voie professionnelle est clairement à l’opposé des besoins exprimés par les personnels, les familles et les entreprises de proximité qui accueillent nos élèves en stage et qui parfois les embauchent. C’est une réforme idéologique, structurelle et managériale. Combien de temps allez-vous laisser le ministère du travail piloter une réforme scolaire dont l’objectif est d’affaiblir l’avenir scolaire et professionnels, d’1/3 de la jeunesse lycéenne ? Combien de temps allez-vous être complice sans réagir de ce saccage organisé qui va faire basculer les établissements scolaires que sont nos LP en centre d’insertion professionnelle ?

L’égalité salariale est une demande sociale forte. Nous savons que le pacte risque d’aggraver ces inégalités voire de les faire exploser. La FSU vous demande d’avoir un calendrier précis sur les plans d’actions le plus rapidement possible. Vous vous y êtes engagé la semaine dernière donc nous attendons une date ? Nous réitérons notre demande : le premier GT en juin doit être sur l’axe 3 qui prétend tendre vers l’égalité salariale, nous rappelons notre opposition à la transposition de l’index égalité dans l’EN.

Enfin, nous souhaitons vous alerter, le département des Hauts de Seine annonce en CSA départemental formation continue qu’il mettra en place des formations obligatoires à public désigné sur les périodes de vacances scolaires : 20 jours pour la formation des directeurs/directrices, 12 jours pour le CAFIPEMF alors que la réglementation ne le permet pas. C’est aussi dans ce département que les vacances apprenantes sont imposées à des enseignant·es contractuel·les. Il serait peut-être temps de signifier au Dasen qu’il ne peut continuer de fonctionner en totale autarcie.