Les ministères de l’Éducation nationale et du Travail viennent de lancer, le 9 février au soir, un nouveau site prétendant permettre aux jeunes et aux familles une lisibilité accrue sur les débouchés des filières professionnelles pour chaque formation professionnelle, du CAP au BTS, de chaque CFA ou chaque lycée professionnel. Avec le lancement de ce site Inser’Jeunes, le gouvernement met quasi exclusivement l’accent sur l’insertion professionnelle immédiate des jeunes dans un contexte de mise en concurrence des établissements.
Le gouvernement, obnubilé par sa vision libérale de la formation professionnelle, poursuit ainsi sa politique agressive en faveur du développement de l’apprentissage, présenté à tort comme seule voie d’alternance, aux dépends de la voie professionnelle scolaire. Pour cela, il met ostensiblement en avant l’indicateur d’insertion dans l’emploi en comparant CFA et LP sans expliciter les biais qui existent dans cette comparaison malhonnête. Il renvoie au second plan les autres indicateurs beaucoup plus favorables à la voie professionnelle scolaire. Ainsi, par exemple, le taux de rupture des contrats en apprentissage est très discret sur le site alors qu’il peut être très déterminant dans le parcours du·de la jeune, notamment quand il s’élève à 50 % pour certaines formations. La mention de la valeur ajoutée est, elle, très visible, puisque l’accent est mis uniquement sur l’insertion professionnelle immédiate des jeunes. Cet indicateur est certes plus défavorable au LP du simple fait que ces derniers ne recrutent pas leurs élèves sur « entretien d’embauche » et que les personnels sont engagés au quotidien pour que tout×es les jeunes sans exception poursuivent leur cursus scolaire et obtiennent des diplômes. A contrario, bien que favorable à la voie scolaire, le taux d’accès au diplôme n’est jamais mentionné alors qu’il est un indicateur incontournable des projets et rapports annuels de performance des lois de finance.
Le SNUEP-FSU se questionne sur l’information réelle apportée aux jeunes en termes d’accès à la formation puisque sur sa page d’accueil le site Inser’Jeunes renvoie essentiellement sur les sites du ministère du Travail ou de Pôle-emploi pour la recherche d’un contrat d’apprentissage.
L’ouverture de ce site va renforcer la concurrence des CFA entre eux et avec les lycées professionnels, ce qui risque, à terme, d’appauvrir l’offre de formation professionnelle initiale pour tou·tes les jeunes.
Du côté Éducation nationale, les indicateurs vont pousser les établissements à augmenter leur taux d’insertion dans l’emploi au détriment du taux de poursuite d’étude. Cela ne peut que mettre à mal la double finalité des formations sous statut scolaire en LP (insertion et poursuite d’étude) pourtant inscrite dans le Code de l’Éducation.
Le SNUEP-FSU dénonce ces manipulations de données statistiques tronquées dans le but de servir la propagande gouvernementale en faveur du développement de l’apprentissage, système de formation discriminant où le bénéfice pour l’entreprise prime sur la formation des jeunes.
Encore une fois, le gouvernement apporte un coup dur à la voie scolaire qui ne pratique pourtant aucune ségrégation sociale et affiche un bien meilleur taux d’accès aux diplômes. Au final, ce sont les jeunes et leurs familles qui sont lésé·es.
Ces choix sont d’autant plus irresponsables que la crise économique qui s’installe devrait en guider d’autres : il est urgent de sécuriser les parcours des jeunes par une lutte accrue contre le décrochage, une amélioration de la qualité de toutes les formations professionnelles et une augmentation du niveau global de qualification.